Contrôle annuel unique dans l’agriculture : communiqué de l’intersyndicale du ministère du Travail
Texte publié le 13 décembre 2024.
Le 4 décembre au soir, lors d’un meeting en Dordogne suite à la censure du gouvernement Barnier, le patron de la FNSEA a décrété la fin des contrôles dans les exploitations agricoles, prétextant qu’il « n’y a plus d’Etat ». Doit-on s’étonner de cette énième provocation des patrons de l’agriculture quand l’État lui-même restreint drastiquement les contrôles ?
En effet, une circulaire datée du 4 novembre 2024 et signée par le 1er Ministre, désormais démissionnaire, instaure pour les administrations de l’État un « contrôle annuel unique » dans le secteur agricole. Sous le prétexte fallacieux de « simplifier » et de prendre en compte les attentes des agriculteurs, le gouvernement entend limiter drastiquement les contrôles qui "irriteraient" (sic) les agriculteur.trices ; il s’agit surtout d’aller dans le sens des organisations professionnelles agricoles les plus à droite, la FNSEA et la Coordination Rurale, en tête.
Sans base réglementaire, la circulaire confie aux Préfet.es l’organisation du « contrôle unique » au sein de chaque département. L’objectif politique est clair : soumettre directement les 17 administrations concernées (dont la MSA et la DREETS) au bon vouloir du préfet et aux ordres du gouvernement.
A l’avant-dernier paragraphe et la toute dernière page, la circulaire précise que les contrôles de l’inspection du travail ne sont pas concernés, mais qu’ils seront à inclure, a posteriori, dans le calendrier de la campagne du contrôle unique. Un contrôle suite à un accident du travail empêcherait donc qu’un autre contrôle soit diligenté par un autre service de l’État ? L’exclusion est en outre partielle puisque les DDETS sont visées pour être incluses dans les MISA (Mission Interservices Agricole) placées sous l’autorité du préfet, pour créer un cadre formel d’échanges entre tous les services au contact du monde agricole. On est en pleine confusion volontaire !
Cette circulaire - initiée par la ministre Genevard qui ne cachait pas ses sympathies pour la FNSEA et son hostilité aux militant.es écologistes - relance le « contrôle bashing » et vise clairement les fonctionnaires, bouc-émissaires de la colère du secteur agricole, laissé.es à la merci du patronat agricole et des préfet.es autoritaires.
Alors que l’année 2024 a commémoré tristement l’assassinat de nos collègues à SAUSSIGNAC, et alors que les agent.es de contrôle de l’inspection du travail sont régulièrement victimes d’agressions et d’obstacles lors de contrôles, cette circulaire les brutalise encore plus !
Les faits actuels sont là pour malheureusement démontrer cette violence inacceptable :
- Le mardi 19 novembre 2024 devant les grilles de la cité administrative de Périgueux, où différentes administrations siègent dont l’inspection du travail, la coordination rurale 24 a accroché des peaux avec les têtes ensanglantées de deux sangliers et a épandu du lisier sur les bâtiments administratifs. A ce jour le préfet de Dordogne n’a condamné cette violente action que du bout des lèvres.
- Dans la nuit du 26 au 27 novembre, les locaux de l’inspection du travail ont été directement pris pour cible à Montauban. Du lait caillé et du fumier ont été déversés, les murs ont été tagués de messages explicitement hostiles à nos services et la porte du garage des voitures de service ont été soudées !
- Il y a peu, à Bordeaux, trois agent.es de contrôle se sont rendu.es en audience suite à un contrôle houleux où un agriculteur avait foncé en tracteur sur une des agentes, évitant de très peu un drame. Le président du tribunal n’a nullement caché son mépris pour l’inspection du travail. Le mis en cause a tout simplement été relaxé !
- Dans le Loir-et-Cher, en octobre c’est la direction locale de l’inspection du travail qui s’est fait le relai direct du préfet qui enjoint de suspendre provisoirement les contrôles, hors accidents de travail ou à de la maltraitance animale.
Rappelons déjà qu’à Agen en avril de cette année un sanglier a été pendu et éventré devant les locaux de l’inspection du travail, sans que cela n’engendre de grandes condamnations locales ou nationales !
Nous notons également que le préfet du Tarn et Garonne a organisé le déménagement des locaux de l’inspection du travail dans le même immeuble que ceux de la FDSEA, en pleine crise agricole et alors que nos locaux avaient été pris pour cible par cette organisation dans d’autres départements. Il est peu de dire que la sécurité des agent.es ne semble pas être la principale priorité du gouvernement !
L’inspection du travail en milieu agricole, comme ailleurs, n’est ni une nuisance, ni une restriction ! Elle est là pour faire respecter les droits des travailleur.ses et veiller à leurs conditions de travail, souvent difficiles ou encore à leurs conditions d’hébergement, parfois indignes. Elle dispose de prérogatives garanties au niveau international qui ne peuvent pas être attaquées par circulaire !
La CGT-TEFP, la CNT-TE, la FSU-TEFE et SUD-TAS dénoncent cette circulaire inique ! Au vu des évènements récents, il est clair qu’elle n’aura qu’un seul effet, celui de conforter la violence envers les services de contrôle de l’État ! Il est urgent de l’abroger. Nos organisations syndicales demandent en outre que toute agression contre les agent.es de l’inspection du travail soit systématiquement poursuivie ; que cela donne systématiquement droit à la protection fonctionnelle et que la direction générale du travail se constitue partie civile !