Être de gauche dans la police : un combat quotidien (CGT Police)
Texte publié le 12 mai 2025.
Dans la police, afficher des idées de gauche, c’est accepter un parcours semé d’embûches. Un·e policier·e de gauche est suspect·e aux yeux de ses collègues, constamment mis·e à l’épreuve. Brimades, blagues quotidiennes, surnoms… chaque jour, il faut encaisser. On devient « Marchais », « Krasucki » ou autre, et ça fait rire la brigade. Pas par camaraderie, mais pour rappeler que vous n’êtes pas dans le moule.
Un·e policier·e qui revendique des valeurs de gauche, ou même qui ne crache pas suffisamment sur elles, est immédiatement catalogué·e, et pour toujours. Alors, le parcours est rude, et la carrière plus difficile. Un·e policier·e de gauche, qui défend des valeurs humanistes, devra redoubler d’efforts, être irréprochable, prouver deux fois plus sa légitimité. Là où d’autres bénéficieront de bienveillance et de solidarité, il ou elle sera scruté·e à la loupe. La moindre erreur, la moindre hésitation sera amplifiée, instrumentalisée.
Une promotion ? Un poste à responsabilité ? Pas impossible mais plus compliqué. Il y a une mécanique bien huilée d’éviction discrète. Les « bons dossiers » ne lui sont pas confiés, les portes se ferment, les chefs hésitent à soutenir. Certain·es finissent par renoncer, par se taire, par rentrer dans le rang pour éviter d’être mis·es au ban.
Une forte pression idéologique
Si en plus on est militant·e, si on ose adhérer à la CGT, on va devoir affronter une hostilité redoublée. Certain·es ont été convoqué·es par leur commissaire dès leur adhésion pour rendre des comptes, se voir suggérer des syndicats « plus neutres ». D’autres ont été relégué·es aux missions ingrates, comme les gardes statiques, pour les pousser à bout. Mais face aux pressions constantes, il y a la solidarité. La CGT est là, avec son engagement sans failles. Nous ne mettons pas notre carrière en priorité, nous défendons nos collègues, peu importe leur sensibilité politique, parce que les problèmes des policier·es de terrain sont les mêmes pour toutes et tous.
Les militant·es CGT sont craint·es par la hiérarchie parce qu’ils et elles tiennent bon, ne se laissent pas briser, savent leur combat légitime et que, peu à peu, les rapports de force évoluent. Quand certain·es pensaient faire taire la gauche dans la police, on a résisté, on s’est organisé et on a montré que les choses peuvent changer. Car, oui, nous refusons que l’institution policière – service public nécessaire en démocratie – soit instrumentalisée pour potentiellement servir des pouvoirs autoritaires et des idéologies mortifères portées par une extrême droite héritière directe d’une idéologie raciste, fasciste et réactionnaire.Si demain ces pouvoirs ont autorité, la police comme institution démocratique au service des citoyen·nes sera portée disparue, ce qui aurait de terribles conséquences sur l’exercice des libertés.
Conspuer, rejeter en bloc n’est pas un projet politique
Il faut impérativement soutenir une police démocratique et respectueuse des libertés privées et publiques. Les amalgames et les caricatures qui conspuent, rejettent en bloc une police repoussoir ne sont pas un projet politique. Le manichéisme, le populisme, la démagogie, les raccourcis intellectuels sont un poison pour la démocratie. Il est urgent de rompre avec l’imagerie qui condamne toute une profession et construit une vision diabolique de la police. Si nous n’avons pas un service public de police placé sous le contrôle des élu·es, nous aurons des milices incontrôlables, bien plus brutales et arbitraires.
La condamnation aveugle (« tout le monde déteste la police ») masque ce que les pratiques policières doivent à la politique : on tape sur l’ensemble d’une profession alors qu’il faudrait taper sur les politiques autoritaires qui autorisent des pratiques policières de plus en plus antirépublicaines et qui cèdent devant des syndicats corporatistes.Nous avons besoin d’une police démocratique qui protège les citoyen·nes, et ce n’est pas en lançant des anathèmes que nous y parviendrons.
La CGT pour une police juste, démocratique et républicaine
Nous appelons les policier·es démocrates et respectueu·ses des valeurs de la République à ne pas surinterpréter le devoir de réserve (les droits d’opinion et d’expression étant garantis par la Constitution), à exprimer leurs inquiétudes, à défendre leur métier de service public et à s’afficher comme protecteurs de la population, de toute la population, sans discrimination aucune. Il faut aussi que nous, citoyennes et citoyens, imposions une police plus juste, démocratique et républicaine car bien souvent ce sont les plus précaires qui souffrent d’une police inefficace et de l’absence de sécurité. C’est pourquoi la CGT Police appelle à construire des espaces de dialogue et de réflexion pour repenser un service public de police qui aura vraiment les moyens d’être au service de toutes et tous.